Consommation de CBD : mieux vaut s'abstenir de conduire

Publié le : 27/09/2023 27 septembre sept. 09 2023

Dans un récent arrêt de cassation du 21 juin 2023, la chambre criminelle de la Cour de Cassation est venue interdire la conduite après consommation de Cannabidiol (CBD) dès lors qu’elle entraîne la révélation de traces de Tétrahydrocannabinol (THC).

En effet, si lors d’un contrôle routier, le test salivaire de détection de cannabis se révèle positif, l’infraction de conduite sous l’emprise de produits stupéfiants est caractérisée, peu importe que les traces de THC proviennent d’une consommation de CBD.

La Cour de cassation vient ainsi clarifier une situation jusqu’alors floue au regard de l’arrêté du 13 novembre 2016 fixant les modalités de dépistage des substances témoignant de l’usage de stupéfiants.

En l’espèce, M. PJ était déclaré coupable de conduite d’un véhicule en ayant fait usage de produits stupéfiants par le tribunal correctionnel.

Il interjetait appel et la chambre des appels correctionnels le relaxait au motif que l’expertise toxicologique ne mentionnait pas de taux de THC et qu’il n’avait pas été recherché si le CBD que l’intéressé disait avoir consommé excédait la teneur admise en THC, soit 0,20% à la date des faits.

Le ministère public formait un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt de relaxe dont le moyen devait être entendu par la haute juridiction.

La Cour de cassation juge que l’article L235-1 du Code de la route incrimine le fait de conduire après avoir fait usage de stupéfiants (I), que l’infraction est caractérisée dès lors que la présence de THC, substance classée comme stupéfiants, est révélée (II).


I. Absence de seuil d’incrimination dans l’infraction de conduite après avoir fait usage de stupéfiants

L’article L235-1 I du Code de la route dispose que « Toute personne qui conduit un véhicule ou qui accompagne un élève conducteur alors qu'il résulte d'une analyse sanguine ou salivaire qu'elle a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants est punie de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende. Si la personne se trouvait également sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par une concentration d'alcool dans le sang ou dans l'air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du présent code, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende. »

Le ministère public dans son pourvoi vient rappeler que cet article ne fait pas référence à un dosage de stupéfiants à établir lors des analyses biologiques du prélèvement salivaire ou sanguin du contrevenant.

Il n’y a donc pas à rajouter à la loi.

De surcroît, l’arrêté du 13 novembre 2016 fixant les modalités de dépistage des substances témoignant de l’usage de stupéfiants- dont la valeur est infra-législative- mentionne un seuil de détection de l’usage de produits stupéfiants et non un seuil d’incrimination.

La cour de cassation fait sien la raisonnement adopté par le ministère public dans son pourvoi.

Cette précision est importante : toute conduite sous l’emprise de produits stupéfiants est interdite et la preuve de la consommation de produits stupéfiants se rapporte selon certains moyens définis par la loi à l’article L 235-2 du Code de la route.

En effet, l’usage de produits stupéfiants est établi au moyen d’analyses sanguine ou salivaire qui révèlent la présence du produit classé comme stupéfiant ; aucune autre vérification telle la recherche et le dosage du TCH pouvant être contenu dans le CBD n’est prévue par la loi.

La cour de cassation se saisit de cette opportunité pour rappeler que l’autorisation de commercialisation du CBD est sans aucune incidence sur l’incrimination de conduite après usage de produits stupéfiants.


II. La commercialisation du CBD ne vaut pas autorisation de conduire après en avoir fait usage

La cour de cassation vient le rappeler « le tétrahydrocannabinol est une substance classée comme stupéfiants », peu importe son taux.

Le taux de THC ne modifie aucunement la nature du THC qui reste un produit classé comme stupéfiants.

Le taux de THC va en revanche être pris en compte pour déterminer sa possible commercialisation.

Toutefois, l’autorisation de commercialiser certains dérivés du cannabis dont la teneur en THC est inférieure à 0,30% (le seuil a été relevé de 0,20 à 0,30%) n’entraîne pas autorisation de conduire après avoir consommé du CBD.

Cette autorisation de commercialisation est sans incidence sur l’incrimination de conduite après usage de produits stupéfiants, l’infraction étant constituée dès lors qu’il est établi que l’individu a conduit après avoir fait usage d’une substance classée comme stupéfiant, tel le THC, peu importe la dose absorbée, qu’elle soit de 0,10 % ou de 0,40 %.

Cette clarification de la chambre criminelle se comprend aisément, l’incrimination de conduite après avoir fait usage de produits stupéfiants ayant un but de protection de la société et des usagers de la route tandis que l’autorisation de commercialisation de certains dérivés du cannabis obéit à une logique commerciale.

De nombreux consommateurs de CBD auront consommé du CBD et conduit sans avoir conscience de commettre une infraction, l’achat de CBD étant légal et presque devenu commun, en témoignent les points de vente de plus en plus nombreux, des bureaux de tabac aux boutiques spécialisées.

Mais pour la justice « Nul n’est censé ignorer la loi ».

Il sera donc préférable de s’abstenir de conduire après avoir consommé du CBD, sous peine de se voir poursuivre pour conduite après usage de produits stupéfiants devant les tribunaux répressifs.
 

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